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Les mystères des Stradivarius révèlés

Comment conserver ces si célèbres violons ? En France et en Allemagne, des scientifiques ont mené l’enquête et percé le secret de leur vernis. Quant à la clef de leur légendaire sonorité…

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di Bertrand Dermoncourt da L’Express.fr – Culture del 18 febbraio 2010

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L’ascenseur est sécurisé. La porte, blindée. Et le silence, total, dans ce laboratoire ultraprotégé de la Cité de la musique, à Paris. C’est au sein de cette unité de recherche et de restauration que vient d’être découvert l’un des secrets de fabrication des Stradivarius : la formule du vernis rouge dont ils sont recouverts. Résultat d’une enquête menée pendant quatre ans par sept équipes françaises et allemandes. Mais était-ce là le secret de la légendaire qualité des instruments, éternel Graal de tous les mélomanes ? Voire. Et pour être tout à fait honnête, il faut dire que ce qui commençait comme l’exacte réplique d’un épisode de la série des Experts a fini par ressembler à une pirouette sortie d’un film de Tarantino. Avec, en prologue, un long flash-back.

En 1830, un physicien français désosse deux violons, sans percer leur mystère. Quelques années plus tard, certains chercheurs suggérèrent que la qualité acoustique des Stradivarius provenait du bois. Nouvelles recherches, nouvelle découverte : l’épicéa utilisé pour la table du violon avait pour origine le Val di Fiemme, en Italie, et l’érable du fond de l’instrument venait, lui, du centre de l’Europe. Quant à la coupe des arbres, elle se faisait à la lune noire de janvier, au moment où toute la sève descend dans les racines, donnant ainsi un matériau très léger. Le bois était ensuite fendu à la main et séchait pendant cinq ans (au moins) pour que l’eau s’évapore et que les résines s’oxydent. Une technique complexe, mais qui ne suffit pas à expliquer la singularité des instruments.

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D’où l’énigme du vernis qui, elle aussi, a rendu fou plus d’un luthier. Comment Stradivarius a-t-il pu obtenir ce rouge si vif qui fait la marque de ses violons ? Le maître de Crémone a, semble-t-il, utilisé des extraits de plantes ou d’insectes. Des colorants, en somme, dont celui appelé “sang de dragon”. Venait-il des abeilles ? Des esturgeons ? De la peau ? Des os ? Toutes ces hypothèses ont été envisagées, sans que la vérité puisse être faite. Jusqu’à aujourd’hui.

“Nous n’avons pas cherché à répondre à ce genre de question, et encore moins à vérifier les légendes, souligne Jean-Philippe Echard, ingénieur du laboratoire de recherche ert de restauration du musée de la Musique. Au départ, nous voulions mieux connaître les Stradivarius du musée afin de mieux les conserver. Nous nous sommes donc intéressés au vernis, sur lequel aucune étude scientifique probante n’avait été menée.” Avec cinq instruments disponibles dans ses collections, le musée de la Musique possède un échantillon d’autant plus intéressant que ces Stradivarius, produits entre 1692 et 1724, couvrent une large période. Le laboratoire s’est attaché à croiser plusieurs disciplines : la chimie, la physique et la lutherie.

Première étape : l’observation. “Nous avons passé une semaine à regarder nos instruments, à l’oeil et à la loupe”, explique Jean-Philippe Echard. Une phase indispensable pour bien comprendre le violon et le “sentir”. Opération suivante : le prélèvement d’un petit échantillon de vernis, sur chaque Stradivarius. Passées au microscope à ultraviolets, les particules révèlent l’existence de deux couches de vernis, dont l’une est enrichie de grains de pigment. L’enquête se poursuit au synchrotron de Saclay (Essonne).

La réponse tombe… un peu décevante

Nouvelle analyse des échantillons dans un accélérateur d’électrons. La composition du matériau va enfin être révélée. La réponse tombe. Sans appel… Et un peu décevante pour les amateurs de sensations fortes : il n’y a aucune sous-couche élaborée à partir d’une quelconque substance inconnue ! Comme les peintres ou les ébénistes, Stradivarius utilisait apparemment une simple (et vulgaire) huile de séchage. Confirmation est (malheureusement) donnée par le laboratoire du Museum d’histoire naturelle, à Paris, à partir de deux autres techniques d’investigation : dans la première couche, on retrouve l’huile de peinture, et rien d’autre ; dans la seconde, cette huile est mélangée à de la résine de pin.

Restait alors à apprécier les grains de pigments. Trois nouveaux laboratoires sont mis à contribution, dont un à Dortmund, en Allemagne. Nouvelle surprise : Stradivarius a utilisé différentes techniques au fil du temps, ce qui met à mal l’idée d’un seul secret bien gardé. Il apparaît également que ces pigments n’ont rien d’original et sont couramment utilisés à l’époque. Conclusion ? “Avec son vernis, Stradivarius ne travaillait pas un effet acoustique, mais… visuel !” souligne Stéphane Vaiedelich, le responsable du laboratoire du musée de la Musique. Tout ça pour ça. Les scientifiques, eux, sont contents, qui savent maintenant comment conserver leurs trésors. Le mystère de la sonorité des violons reste donc entier. Il faudrait désormais connaître la technique, sans doute originale, avec laquelle Stradivarius appliquait son banal vernis. Un pinceau, peut-être ?

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Inserito su www.storiainrete.com il 23 febbraio 2010

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